Au sud de St Louis, au bord du fleuve, la commune de Gandiol a longtemps été une zone très favorable au maraîchage. La situation a largement changé avec la salinisation du fleuve. Le phénomène de salinisation existe depuis les années 1980, notamment à cause de la construction du barrage de Diama, au nord du pays, pour les besoins de l’agriculture intensive et de la navigation, mais il s’est accentué avec la grande opération d’ingénierie d’ouverture de la Brèche.

En 2003, le niveau du fleuve était largement au-dessus de la côte d’alerte, menaçant l’île de Saint-Louis de graves inondations. Dans la nuit du 3 au 4 octobre 2003, les autorités creusent un canal d’écoulement sur la Langue de Barbarie pour déverser le surplus d’eau vers l’Atlantique. Ce canal a créé, artificiellement, une nouvelle embouchure du fleuve Sénégal communément appelée “la Brèche”. Saint-Louis a évité le pire, le patrimoine de l’UNESCO a été sauvé, mais la commune de Gandiol, située
juste en face de la Brèche, elle, s’est retrouvée touchée de plein fouet par l’érosion côtière et la salinisation.

Aujourd’hui, à Gandiol, les champs sont devenus impossibles à cultiver sans de gros investissements, car seule la construction de forages permet d’accéder à l’eau douce. Beaucoup d’hommes ont alors quitté la commune pour aller travailler ailleurs au Sénégal, en Casamance ou à Dakar, afin de pouvoir envoyer de l’argent à leurs familles. Avec ces départs, de nombreuses femmes ont commencé à travailler, en plus d’assumer les tâches domestiques. Ceci a favorisé l’émancipation de certaines, mais d’autres se sont précarisées, obligées de s’adonner à des travaux pénibles et difficiles.

Fama Séne, une habitante de Gandiol, raconte comment la salinisation a poussé son mari à partir en Casamance et les difficultés de la relation à distance. Elle évoque comment la mort de son mari et l’impossibilité de cultiver ses champs l’ont conduite à la précarité et à la collecte des coquillages, une activité aussi dangereuse que peu rémunératrice.

Texte By Pr. Marion Fresia